J’aime Sartre.

Sartre est un homme. Lors de son enterrement deux ans avant ma naissance, on disait, « ce vieillard, il est notre jeune. » (Le siècle de Sartre, 807)



1 Qu’est-ce qu’un homme ?

1.1 Au-delà de la mort

Simone de Beauvoir n’est certainement pas la première qui dit que la propre définition de l’homme vient d’un dépassement de la mort. Dans Le Deuxième Sexe, Beauvoir raconte comment un homme de la façon la plus primordiale et la plus fondamentale devient lui-même, c’est-à-dire par le combat pour obtenir la nourriture afin de protéger son espèce. En bref, pour éviter la mort, et ainsi donc pour survivre, combattre c’est la garantie minimale de la vie.

Tous les Hommes sont mortels, alors confronter la mort positivement et la surmonter est probablement devenu le moyen le plus direct pour résister à l’angoisse de la mort. Dans une époque de totem et de tabou, les hommes deviennent ce qu’ils sont par leur vie qui de chaque instant est jeu, guerre. Pour les femmes, cela constitue une haie pour les protéger et construit la base de la sexualité énigmatique des femmes. De même pour les femmes surmonter la mort qui peut arriver à tout moment, la procréation rend la vie éternelle possible. Horney dit, « c’est la jalousie nécessaire de l’homme envers la femme. »

En même temps, au moins au début de la civilisation, l‘homme confronte et surmonte la mort non pas seul mais en faisant partie d’un groupe, par exemple pour chasser un ours ou un tigre. Dans ce sens, les hommes doivent unir leurs forces afin d’éliminer nos ennemis naturels avec lesquels nous combattons un à un.


1.2 Le père et le fils, le père originel et le héros

La question de l’homme dans la tradition psychanalytique commence par ce groupe-là.

L’histoire de totem et tabou est similaire. Freud suppose que le père qui est au-dessus de ce groupe constitué pour surmonter la mort et les travaux dangereux, qui est le père originel, maîtrise le droit de vie et de mort, maîtrise toutes les femmes, maîtrise la jouissance à laquelle les hommes ont droit. Naturellement, les fils le haïssent, s’unissent et le tuent. Mais Lacan dévoile que, même âpres que les fils tuent le père, les femmes ne les veulent pas.

Pour les fils, la mère est la personne qui leur donne la naissance, le père qui leur donne/peut leur donner la mort, ceci est encore le cas quand celui-ci est mort, mort de leurs mains. C’est le père mort qui leur fait comprendre qu’est-ce que la loi, pour après devenir un homme, un homme comme le père. Et c’est le désir de la femme qui sollicite tout cela. C’est-à-dire, chez la femme, le père et le fils sont perçus d’un autre angle. Ils sont les virils. Mais on peut distinguer une virilité extérieure et une virilité intérieure. La virilité extérieure est comme celle du viol. Les femmes ont besoin de leur propre virilité pour y résister et la seule personne qui peut résister y est leur propre homme. Le père qui peut donner la mort à ses fils c’est justement celui qui possède la virilité intérieure pour résister à la virilité extérieure. Parmi les autres hommes, il est l’homme parmi les hommes, il est le héros.

Le héros est différent du père originel. Le père originel donne la mort à ses fils, le héros meurt à la place des autres. C’est la différence entre le Dieu dans l’Ancien Testament et le Jésus chez St. Paul. Yahvé mesure le bon et le mal par sa loi, donne la destruction et l’Arche au monde, donne des exemples comme Sodome. Par contre, Jésus chez St. Paul consacre sa vie pour l’amour, meurt pour les autres. Plus tard Paul fera la même chose. Par rapport au père originel, Jésus ou Saint Paul sont des hommes parmi les hommes, et tous les autres hommes sont devenus leurs femmes. Deleuze dit, ce Paul dont on parle aujourd’hui c’est le premier Paul-là.

Freud raconte la moitié d’histoire, mais en fait l’histoire complète est déjà racontée depuis des siècles parmi les singes.


1.3 L’homme et la femme

Horney est une féministe dans le cercle de la psychanalyse. Avant qu’elle ne parte aux États-Unis, elle avait écrit un article critiquant Freud sur son point de vue concernant les femmes. Selon Horney, la compréhension de Freud sur les grands travaux des hommes ne reflète que la jalousie envers les femmes. Cette agressivité a aussi influencé Huo Datong. M. Huo discute de la naissance de l’homme dans sa thèse : par le biais de la procréation des femmes, par leurs actes créatifs symboliques les hommes procèdent à une naissance imaginaire. Ainsi, les hommes chacun peut faire face à l’imaginaire féminin et même à un certain niveau au réel, afin d’essayer de trouver l’immortalité symbolique. Tous les mythes chinois supportent ce point.

Quand la vie symbolique passe dans la main de l’homme, la mort imaginaire est donnée à la femme. Comme il n’y a pas de femme qui ne soit pas le phallus, pour une femme, naturellement elle s’imagine comme le père originel. Le bâton qui représente la mort symbolique dans la main du père mort va incarner l’enfer imaginaire chez les femmes. Évidemment, cette pulsion illimitée va affoler les femmes. Elles restent coincées dans l’abîme de soi-même. Donc seule la femme folle est une vraie femme, la femme parmi les femmes. Carmen et Adèle Hugo en sont de bons exemples.

Un tel modèle symétrique sur une opposition de base s’établit entre les deux sexes : la femme aimée par l’homme le pousse toujours vers la mort, « continue, continue… », l’homme qui reste debout à la fin est le vrai homme ; l’homme aimé par la femme est celui qui la prend pour la déesse céleste qu’il essaye de créer, « une belle au bord de l’eau », la femme qu’on ne peut jamais atteindre c’est la vraie femme.

Ainsi, l’énigme de la sexualité n’est pas la même chose que la caresse de mère. M. Huo n’a pas tort. Si on met l’équation de Lacan sur la croix de M. Huo, on voit plus clairement les véritables relations entre père, mère, homme et femme :


Le schéma originel de M. Huo



La mort et la vie réelle partiellement appartiennent aux parents, donc l’homme est obligé de confronter l’impasse du corps.



2. L’homme Sartre

Sartre est un homme, il n’est qu’un homme.

Sartre n’a pas de père. Son géniteur meurt très tôt, il n’a pas laissé de souvenirs lointains ni de fantasmes. Son grand père maternel préfère jouer un jeu d’avant sa mort. Son beau-père est presque seulement son compétiteur, ce père qui est nominalement le seul réel l’a même beaucoup aidé financièrement.

Avant la puberté, la famille de Sartre est bizarre comme celle qu’il construira après. Il a vécu dans une famille de quatre personnes. La mort de son père l’obligea avec sa mère à vivre au dépend des autres. Dans cette nouvelle famille, le grand-père maternel et la grand-mère maternelle sont le père et la mère. Sartre aime les appeler ensemble « Mamie Karl ». Le grand-père maternel donne le nom ; la mère maternelle est la mère, tandis que sa propre mère est sa grande sœur. À la maison, sa mère a plus de contraintes que lui, elle est même privée d’occasion de sortir et de se retrouver avec des amis par « le grand-papa » et « la grand-maman ». Sartre dit qu’en quelques mois, sa mère s’est retrouvée isolée de son cercle d’amis. Sa mère et lui habitent ensemble comme deux sœurs, et jouent à des jeux avec « leurs parents ».


2.1 Nom du père

Sartre n’a pas de père. Ce qui amène Sartre à dire « je ne me suis pas dépassé. » Le grand-père maternel qui a la fonction paternelle est trop aimable donc la loi du père et l’image du père originel sont faibles. « Karl » est juste un nom. Mais le nom du père donne un autre spectacle, sur cette autre scène, Sartre joue sérieusement toute sa vie. Cette autre scène est la scène littéraire, chaque livre est un morceau de cette scène.

Les livres sont l’autre pour Sartre. C’est après qu’il commence à lire qu’il découvre les copains de son âge, d’ailleurs c’est en découvrant qu’il ne peut être leur ami qu’il retourne vers les livres. Dans la bibliothèque de son grand-père, chaque livre devient son ami, une personne. L’histoire ou le savoir que le livre raconte sont naturellement devenus la parole d’un ami. Donc pour Sartre, il n’existe pas l’adoration ou la dévotion. Tous les écrivains s’assoient avec lui dans la bibliothèque. Depuis son enfance il n’a jamais pris les ancêtres pour des dieux. Ils sont tous des ami(e)s. Leurs paroles ne sont pas plus que des bavardages d’enfants. Gide et Heidegger, l’un est en face de lui, l’autre à côté de lui, bien qu’en fait ce soit le contraire.

Du fait de l’échappatoire qu’offre la peur de la mort, la loi du Nom-du-Père qui est transmise par le grand-père paternel est précaire, Sartre cherche alors lui-même la castration dans les livres. Dans le projet du grand-père pour Sartre, l’inconscient par ses paroles établit pour Sartre de façon inverse le phallus. Quand Karl pense qu’il manque de sens pratique à cause de son problème financier, Sartre trouve son propre sens. Le regard du grand-père aide Sartre à accomplir sa première castration. Sartre accompli son premier pas dans la vie comme le grand-père le désigne pour lui.

Difficile à dire le grand-père est comme l’Autre comme le père, il est plutôt comme la mère en empruntant le titre de la Loi paternelle, il ne sait rien sauf la réalité. La seule fois que Sartre est impacté par l’Autre en tant que père, c’est pendant le 2e guère mondiale qu’il a rendu la visite chez Jean Cavaillès. Il était trop anxieux au point qu’il n’a rien dit même ce denier l’a consolé beaucoup. Devant le père, on est toujours silencieux. Jean Cavaillès est le seul père pour sa vie, le père contingent, dans le rapport entre le sujet et l’objet, dans l’énigme réelle, Jean Cavaillès donne le chemin d’existence par sa fidélité et sa mort.

Un chemin du corps, le père contingent, la mort et la vie contingent, tout cela fait Sartre retourner vers lui-même, vers les livres, vers les copains. Le corps de Sartre est le livre, son acte est d'avaler les livres et ensuite les produire mais ne pas besoin de les procéder, comme si être le phallus n’a pas besoin de l’avoir.


这是一条身体的路,偶然的父亲偶然的生死,将萨特还给自己,还给书籍,还给伙伴。萨特的身体是书籍,萨特的行动就是吞噬书籍和生产书籍却不需要装作占有书籍,就好像是石祖就不必有石祖。后来萨特投身于人民事业之中,就好像当初在电影院里和人们在一起。萨特的一生重复了儿时镜像的节奏,书籍到同类,却没有一个同类稳定的在父位让他终生倾倒,因此也就拒绝成为一个父亲、一个老男人,始终作为一个男孩儿而成为一个纯粹的男人。书籍和人们都是小彼者,只有小彼者的整体是大彼者,也就是萨特在艰难的无神论一生中所替换上帝的。

没有现实的父位能够抽身,保罗就和圣保罗一样身处无法终结的战场上,拉康说那是维持石祖无法消除的紧张,这紧绷的弦摧毁了萨特的身体,以迟到的方式带来死亡,这个代价给了萨特无死。萨特始终活在焦虑的乐观主义里,这是萨特的永生。

维克多在萨特死后的经历证明他是和卡瓦依埃一样的人,这也就能够让我们理解萨特为何会将他看做是自己,他在萨特的世界里不是儿子,而是萨特自己,他们的关系是同性恋。这也是为什么波伏娃在那次看似大不了的文章中如此愤怒,以至于毕生唯一一次无法同萨特分享另一个人的在场,这对萨特的困扰甚至可能提前了他的死亡。


2.2 L’enfant

Sartre ne devient pas le père. Chaque fois quand il évoque l’enfant, il le déteste.

Dans plusieurs sens, il chasse l’enfant. Il ne fait pas l’enfant, il dit le mal sur les enfants des autres. Pour lui, l’enfant d’abord implique une tentative à camoufler le perdu au rapport sexuel. De plus, il oppose un fantasme métaphysique sur l’enfant, le conte qui dit l’enfant est l’angle est un crime qui cache les yeux des parents. Dans le monde de Sartre, chaque enfance de chaque personne est misérable, tragique. Le désir de l’Autre lui fait trembler, c’est pourquoi il dit « l’Autre est l’enfer. »

Il n’accepte pas l’enfant, donc il ne peut pas devenir le père. Dans le domaine métaphysique Sartre n’est pas le père non plus. Il a ouvert le chemin pour les vedettes d’une génération, mais Althusser, Lacan, Foucault, Deleuze, Camus lui jettent dans le néant en incitant ses paroles. Quand les disciples psychanalytiques évoquent « l’autre », qui va penser Sartre avec la nostalgie ?

Dans le combat des hommes, il n’est pas l’empereur, il est le héros sanglant.


2.3 La femme

Une partie de Sartre reste dans la femme.

La mère de Sartre le prend comme une fille. Tous les deux vivent comme deux sœurs. Ça correspond le cas de Beauvoir. Elle vit avec sa sœur cadette comme avec son ombre. Leur idéal est la même saine qui subit la torture. Cette image du moi dans le miroir influent Sartre directement. Il n’a jamais le corps beau masculin, au contraire son corps ressemble beaucoup un corps féminin. Quand Beauvoir parle de son corps, elle préfère son ventre souffle. La sexualité de Sartre est différente aussi, il n’aime pas le coït mais les caresses.

Le corps de Sarte est un corps de femme, donc il essaye à l’exclure en tant que l’homme.

Il veut exclure son corps par ravager le corps, il déteste le corps réel de femme, il déteste les besoins de femme, il n’habite pas avec les femmes. La femme est posée dans le miroir idéal à distance avec la réalité. Pour garder cette figure idéale de femme, Sartre change de femmes sans arrêt.


萨特的身体就是这样的女人的身体,因此他作为一个男人力图排除。

他通过糟蹋自己来排除自己的身体,他讨厌女人在生活中真实的身体,讨厌她们的所有吃喝拉撒,他不同任何女人同居。这样,女人就只能被现实的距离放置在一种理想的镜像中,于是萨特通过不断的更换女人来维持女人的理想形态,和女人谈话、彼此幻想就是最常见和持久的形式。当多洛丽丝妄图借助爱情在婚姻中将萨特吞噬的时候,他毅然了断了这次想象死亡的历程,在母亲的目光中这个女人的萨特就这样维持着男人的自己与被排除的女人的距离。

只有一次恐怕是他回归的契机。当他晚年如此钟情于维克多的时候,这似乎是萨特毕生唯一一次坦然让被排除的女人回到自己的身体,那次导致与波伏娃致死难弥的裂隙事件绝不是老了那么简单,那是萨特承受着维克多这个男人的意志,而自己那个当下的女人接纳了。

除了这个例外,波伏娃总是帮着萨特及时的在这种可能沉醉不起的排除中回到男人的位置,通过她所具备的、她的父亲称为是男人的头脑、和萨特一起回到男人的创造中,用工作继续维持男人可以拥有的石祖。

除了波伏娃,萨特另一个特殊的女人是母亲,萨特一生唯一一次购房是自己和丧偶的妈妈偶尔同居的家。在没有父亲介入的母子联系中,妈妈对儿子永生的幻想支撑着萨特不竭的创造与转变。他从不顾及写完的作品,不断地抛弃以往的自己来创造新理论和新生活,临死之前还在为自己能够开始一个新的思想历程而图谋着十年规划。


万人空巷的葬礼之后,萨特如其所料的走入了历史的遗忘。他是时代的飓风,刮过。风是“巽”卦,一个隐藏着消失的少阳卦,不是消失于虚无,而是消失于小彼者的世界。活着的人们成为萨特的同时将他遗忘,这才是纯粹的“生”。

1955年萨特和波伏娃到中国逛了一圈,那时候我们刚通过抗美援朝结束了汉族800年奴隶史,出于类似的原因,萨特回去之后成了毛派分子。我和萨特之间也因此有了种直接的亲密。在这种亲密中,我嫉妒萨特,这是一种男人间的嫉妒,出于这种嫉妒,我要让萨特再生。




注:

[1]霍大同先生的原图:



 

L’Homme Sartre

à Michel Guibal


Wang Liang

王亮

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Texte présenté à Chengdu lors du colloque franco-chinois

« Masculinité et paternité »

男性与父性

19, 20 et 21 avril 2011


Traduction de Violaine Liebhart


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