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Poème
Wáng Wéi (699 - 759)
王維
紛  澗  山  木
紛  戶  中  末
開  寂  發  芙
且  無  紅  蓉
落  人  萼  花

D'emblée se pose la question de l'orientation des lignes. Lacan en 1959, évoquera le joke d'un rêveur associant l'écriture horizontale aux lèvres de la bouche et l'écriture verticale aux grandes lèvres.
En l'occurrence on lit de haut en bas et de droite à gauche

La traduction en est :
    arbre • extrémité, accessoire / hibiscus • fleurs
    montagne • milieu, centre / produire, devenir • rouges • corolles
    ravin, torrent • porte, logis / calme • il-n'y-a-pas • homme
    pêle-mêle, en masse / éclore, s'épanouir • en même temps • décliner, tomber

Vous constatez l'absence de ponctuation dans ce texte. Ceci est habituel dans les textes classiques et encore sensible dans les textes contemporains.
Dès 1953, Lacan souligne comment cette absence de ponctuation, de tous les textes canoniques d'ailleurs, cultive ainsi l'ambiguïté et comment le sens n'est pas fixé. Cette ambiguïté de la langue chinoise sera un élément essentiel dans l'intérêt que Lacan lui porte.
Mais l'absence de ponctuation se double d'une absence de grammaire propre à la langue chinoise. Les caractères sont invariables. 
Il n'y a aucune marque de temps, aucun article, aucune quantification. En somme, les mots chinois fonctionnent comme quand en français on dit : du sable. 
De ce fait, l’important, c’est le mouvement qui lie les caractères entre eux : c’est donc ce qui ne sera pas dit ou écrit.


木 mù = arbre • bois • de (en) bois • cercueil; bière • engourdi
… et ça commence par un premier trait…

On y reconnaît le tronc, les branches et… les racines. Quand on propose de dessiner un arbre, rares sont les gens qui dessinent les racines. On ne dessine pas ce qu’on ne voit pas. Mais le caractère chinois s’obstine à le faire. Or dessiner quelque chose d’invisible ce n’est pas représenter un objet mais une idée, l’idée qu’on a de la chose.
Un idéogramme est le schéma d’une idée. Certains ont même espérer trouver là un espéranto graphique, un métalangage.

Considérons le caractère 象 xiàng. Il signifie éléphant , mais aussi ressembler à quelqu’un ou quelque chose. Il dit la figuration ou l’image qu’on se fait d’une chose ou d’un phénomène. 
Alors, pourquoi l’éléphant associé à la ressemblance, à la figuration ?
Le philosophe Han Fei Zi  au IIIe s. av. J-C, remarqua que depuis longtemps les éléphants avaient déserté la Chine. Mais les paysans continuaient de déterrer des carcasses d’éléphants morts. Alors ils se fondaient sur cette vision pour se le figurer vivant!
 Ainsi en va-t-il du caractère chinois. Il ne représente pas la réalité mais il la rend présente. Cette réalité, ce signifié sont même tellement présents qu’ils poussent le discours à être allusif, à dire à côté, à métaphoriser… Ces caractères suscitent l’adhésion au point que Granet parle, à leur propos, « d’emblèmes »
Un signe chinois fait plus que représenter la réalité, il a vocation à la rendre présente… le signe chinois fait plus que dessiner la réalité, il l’imite.1
[…] derrière le signifiant scripturaire, ce qui se profile est traditionnellement vécu moins comme un signifié, que comme étant la chose même : cette invasion constante du réel dans l'ordre symbolique, ce court-circuitage redoutable qui menace en permanence, et qui convoque la jouissance et l'interdit, est sans doute la cause première d'une pratique générale du discours qui, en Chine, a tendu, depuis les débuts même de la tradition des textes, vers l'allusif, la métaphorisation, le dire à côté. 2


末 mò = bout des branches

芙蓉 fú róng = hibiscus ( ketmie; rose de Chine • lotus ) 
Les fleurs remarquables de l'hibiscus ne durent guère plus d'une journée, elles sont renouvelées sans cesse pendant tout l'été.
Étudions comment se compose habituellement un caractère. Nous avons vu comment le caractère 木 qui dit ce qui a à voir avec le bois et l’arbre, dans sa simplicité évoque la réalité. Ces caractères dits purement idéographiques ne représentent que 5% de l’ensemble des caractères. Mais ce sont eux qui font tellement fantasmer les occidentaux… Le plus souvent, les caractères se composent d’un élément idéographique, comme 木, et d’un élément phonologique choisi par métonymie sonore.

Ainsi le caractère 芙    
        => 艹 clé de l'herbe est l'élément idéographique
        => 夫 fū = mari est l'élément phonétique 
                                qui évoque la présence de l'homme

Le caractère 蓉 est beaucoup plus complexe et peut se décomposer ainsi
                蓉     => 艹 clé de l'herbe (là aussi élément idéographique)
                        => 容 visage, aspect (élément phonographique)
                                    => 宀 toit
                                    => 谷 vallée • céréale, grain
                                            => 八 huit
                                            => 人 homme
                                            => 口 bouche
                                                une bouche dans une fleur !

Joël Bellassen propose de considérer les caractères chinois comme des visages. Un visage, ne dit pas son nom; un caractère non plus. Mais il dit plus facilement son sens. Il s'agit donc de mettre un nom dessus comme on le fait pour un visage. 
Dans un système alphabétique, la combinatoire permet, même si on ne connaît pas le mot, de le dire, de l'entendre. En chinois, il faut le connaître. Et pour l'apprendre, il faut qu’on vous le présente comme on présente quelqu’un et son visage. Il faut passer par un maître : dictionnaire, professeur, compagnon… Le sujet ne peut s'approprier l'écriture de façon autonome ! Il dépendra toujours d'un autre qui lui la dispensera.
Si on pense comme on parle, et là comme on écrit, on voit de quelle façon tout Chinois est soumis au discours du maître.
Voilà pourquoi, Rainier Lanselle s'interroge sur la possibilité de « décaler le discours du maître », de la possibilité d'une psychanalyse, et ce au-delà de toute considération culturelle, ethnique…

花 huā : vous y reconnaissez 艹 la clé de l'herbe
化 dit la transformation - changement / culture
亻= 人 𠤎 initialement 人 = homme qui change et bouge



木末芙蓉花
François Cheng souligne la richesse de ce vers tel qu’il s’écrit, se dessine, la richesse de l'expression graphique :
    - 木 l'arbre nu
        - 末 quelque chose naît au bout des branches
            - 芙 le bourgeon surgit
                - 蓉 l'éclatement du bourgeon
                    - 花 la fleur dans sa plénitude

Dans cet ensemble, chaque caractère compose les éléments d’un puzzle. Chaque élément renvoie à un autre et s’élabore par les procédés de condensation et de déplacement. Déjà Freud avait souligné la similitude du texte chinois avec le rêve.
Chaque caractère devient comme un puzzle dont les éléments se combinent, renvoient les uns aux autres, avec des compositions de substitutions et de déplacements qui sont celles-là mêmes décrites par Freud pour le rêve et reprises par Lacan pour le signifiant. Les lois de composition du caractère incluent les lois de composition du signifiant.3

L'idéogramme 木 qui vous est désormais familier va en produire d’autres par un mécanisme de condensation. Ainsi :
林 : deux 木 (arbre), cependant il ne signifie pas deux arbres, mais la forêt.
森: trois arbres, cet idéogramme ne désigne pas trois arbres, mais la grande forêt.
从: deux 人 (humain), il ne représente pas deux hommes ni la foule, mais l’action d’obéir.
众: constitué par trois personnes, il ne représente pas trois hommes, mais la foule.
L'idéophonogramme, comme nous l’avons déjà vu, est le produit du mécanisme de la condensation + déplacement
    马 « cheval » qui se prononce « ma » est employé comme élément phonétique dans:
                            妈: maman    骂: injurier    码: chiffre    蚂: fourmi
déplacement d’une image visuelle entre des caractères dont le sens est différent.

山 shān = montagne
                            
                        
中zhōng
représente une flèche qui traverse la cible en son milieu. Il évoque le milieu, le centre, ce qui est au centre. Il est aussi l’emblème de l’Empire du Milieu, la Chine.

Autrefois, les gouvernants étaient choisis en fonction de leur art au tir à l'arc. Le concours de tir se déroulait en musique : les coups n’étaient décomptés que si la flèche avait atteint le « milieu » de la cible au moment « juste », c’est-à-dire à un moment précis de la mélodie marqué par le son du gong. Cela correspond à notre : pan, dans le mille ! (Cf. Javary)
Il s'agissait donc de viser juste, mais aussi de le faire en parfait accord avec toutes les composantes de la situation présente. Comme nous le disons de l’interprétation qui est juste quand elle vient au bon moment.
Ceci détermine l'attitude juste ou encore, le milieu juste. Le « milieu juste » zhōngyōng, 中庸, n’est pas celui de la demi-mesure, du « à mi-chemin » (point trop n’en faut, etc.).
Mais il est de se maintenir également ouvert aux extrêmes, à l’un comme à l’autre, et c’est dans cet «égal» qu’est le mi-lieu. C’est cette attitude, ce comportement qui fait la disponibilité; et c’est l’affaire de la personne entière.

發 fā = devenir, produire
(  aussi envoyer, livrer, délivrer, distribuer, expédier, émettre • prononcer, exprimer • produire • devenir • lever, gonfler • se mettre en route )

紅 hóng 
= rouge => travail 工 (de la) soie 纟糸 (工  que l’on a longtemps appelé l'« équerre » des charpentiers)

萼 è = calice
Voici l'exemple d'un caractère  plus rare. Avant de vous parler de ce poème, je l'ai soumis à des Chinois pour voir leurs réactions, leur lecture, leur avis…  La plupart des fois, ils ont buté sur ce caractère et j'ai dû leur expliciter! Eh, oui !
On estime en général qu'il faut connaître 1 500 caractères, 1500 visages différents, pour pouvoir entrer vraiment dans la lecture. Il faut en connaître 3 000 pour pouvoir lire un journal. On estime qu'il existe quelque 30 000 caractères. Voilà pourquoi, on peut dire qu'on ne sait jamais lire le chinois… totalement ; il y faudrait plusieurs vies.
Pour les apprendre il faut suer, enfin xué 学! Ce caractère veut dire étudier. Il veut aussi dire imiter. Il s’avère donc que pour les Chinois apprendre c'est imiter. Les caractères ne disent pas un signifié précis mais ce qui a à voir avec ceci ou cela.
Et pour apprendre ces fameux caractères il faut les copier, les imiter, les copier, les écrire, les écrire et encore les écrire… La tradition dit : jusqu’à noircir d’encre l’eau de la rivière à force de rincer les pinceaux. Et Lacan s'était soumis à cette discipline. 
Ces caractères, il faut les fréquenter avec insistance et donc créer des liens intimes, corporels, avec eux pour se les approprier.
Cet investissement du caractère, devient un sur-investissement quand on considère les origines divinatoires et magiques prêtées à l'écriture. Pour un Chinois, le caractère a un pouvoir en soi. Si vous avez peur que des esprits passent le seuil, il suffit d'y écrire le caractère disant le couteau, ou la hallebarde… 
Pour attirer le bonheur, on inscrit partout le caractère qui dit le bonheur fú 福.  Bien mieux : comme le phonème dao veut dire tout aussi bien arrivé que renversé, on écrira bonheur en le renversant histoire de le faire arriver. Si les Chinois ne sont pas religieux, ils sont par contre terriblement superstitieux.
Voilà donc un caractère qui affirme l’origine magique, l’harmonie avec le procès de la nature, la présence de l’objet, l’investissement physique…

澗 jiàn = ravin; ravine; espace où l'eau s'écoule
                eau 氵
                    intervalle 間
                        entre deux portes 門 où s'entrevoit le soleil 日
La métaphore de l'eau se retrouve très souvent associée au Dao dont elle est la figuration par excellence: comme le Dao, l'eau jaillit d'une source unique et constante tout en se manifestant sous une infinie multiplicité de formes; de par sa nature insaisissable et labile, elle est à l'infime lisière entre le rien et le quelque chose et passe par d'infinies transformations. Mais dans sa capacité à donner la vie, elle est souvent associée aussi au féminin, au Yin. 
L'eau est au cœur de tout un réseau métaphorique. Du fait qu'elle coule toujours au plus bas, elle est ce vers quoi tout le reste conflue, appelant ainsi l'image de la Vallée. Dans son humilité (et son humidité!), elle [l'eau] est pourtant ce qui donne vie à toute chose, symbole en cela du féminin, du Yin qui conquiert le Yang par attraction plutôt que par contrainte.4
Le Yin et le Yang, comme les deux versants de la montagne, et dont Lacan nous donne une figuration mœbienne. 

戶 hù = représente un des battants de la porte 門 et donne l’idée d’un logis, d’un abri.
Et comment ne pas repenser à cette évocation par Lacan, de Lao-Zi qui « habitait une cabane près d’un ruisseau… il habitait à cause du fait que le corps ne fonctionne pas autrement. Mais ça ne l’empêchait pas de parler d’une façon très très sûre »
[…] l’appartement, si nous en croyons le Tao, est toujours trop meublé.
Comme nous n’avons besoin de rien si ce n’est d’une coquille, au fond, je veux dire un petit abri parce que l’homme est porté à habiter, donc il habite… parce que je pense que même Lao-Zi habitait une cabane près d’un ruisseau… il habitait à cause du fait que le corps ne fonctionne pas autrement. Mais ça ne l’empêchait pas de parler d’une façon très très sûre… Il n’avait pas eu besoin des progrès scientifiques modernes pour avertir que ce n’était pas dans ce sens-là qu’il fallait aller… et dans un langage admirable…5


寂 jì = silencieux; tranquille… à noter la clé du toit…



無 wú
Nous rencontrons là un des fondement même de la pensée chinoise et de l’ontologie taoïste. 
Il se définit en général par son contraire,  yǒu 有« Avoir», et il est généralement traduit en Occident, par rien, mais aussi par Non-avoir; Il-n’y-a-pas; l’indifférencié…
    Il n'a pas vraiment le sens de néant ou de rien. Il représente, de façon inhérente, un complément à l’affirmation; comme la virtualité qu’elle recèle d’un changement informulable mais inéluctable. L’il n’y a pas serait le pas encore manifesté. Il serait ce qui n'a pas encore les contours de la réalité visible. En cela un wú se cache dans ou derrière chaque assertion de la langue chinoise. 
Il serait, comme le dit François Jullien, l’in-actualisé. et il renvoie à l’idée du fond latent du procès de la nature. Chaque être est autre chose, et même d’autres choses. Autre encore il deviendra.
Cette question des rapports entre la réalité manifeste (l'il-y-a, you 有) et le fond indifférencié (l'il-n'y-a-pas, wú 無) hante la pensée chinoise au fil des siècles.

Wú 無 est une des façon de dire ce que nous traduisons par vide.
Ce qui est avant Ciel-Terre, c’est le Non-avoir, le Rien, le Vide. Au point de vue de la terminologie, deux termes ont trait à l'idée du Vide : wú 無 / 无 et xū 虛 / 虚 (par la suite, les bouddhistes privilégieront un troisième terme : kōng 空 ). Les deux, étant solidaires, sont parfois confondus. Néanmoins, chacun des deux termes peut être défini par le contraire qu'il appelle. Ainsi wú 無 / 无, ayant pour corollaire yǒu 有« Avoir», est généralement traduit en Occident, par « Non-avoir » ou « Rien »; tandis que xū 虛 / 虚, ayant pour corollaire shí 实/實 « Plein », est traduit par « Vide ».6

Mais Lacan, en 1966, nous met en garde : 
« Et si vous croyez que c'est facile à expliquer ça, cette notion de champ et de vide! »
Il ajoute, en faisant une référence direct référence directe au wú 無, le « Non-avoir » ou « Rien » :
« j'ai appelé cela : le «hiarien », écrit comme vous le voyez là7 »
Et quand, lors du séminaire de l'Éthique, il parle du vide comme le vide de Das Ding, de la Chose, il se réfère directement à Heidegger. Mais peut-être peut-on aussi y reconnaitre une référence à l’exemple du vase et de la formulation du Laozi (11) :
Trente rayons se rejoignent en un moyeu unique; ce vide dans le char en permet l’usage. 
D’une motte de glaise on façonne un vase; ce vide dans le vase en permet l’usage. 
On ménage portes et fenêtres pour une pièce; ce vide dans la pièce en permet l’usage. 
L’Avoir fait l’avantage, mais le Non-avoir fait l’usage.
François Cheng nous propose la vallée comme représentation concrète du vide, la vallée qui permet l’action de l’eau, du Dao.
Dans l'ordre du réel, le Vide a une représentation concrète : la vallée. […] L'eau, comme les souffles, apparemment inconsistante, pénètre partout et anime tout. Partout, le Plein fait le visible de la structure, mais le Vide structure l'usage.8
Le paradoxe touche ici à son comble : l'absence aurait plus de présence que ce qui est là, le vide aurait une efficace que le plein n'a pas. Ou comme le dit Jean Oury, le vide-médian du taoïsme, c’est celui sur lequel se construit notre existence, « c’est celui qui permet qu’il y ait métaphore » (Création et schizophrénie, 1989)

人 ren c’est l’homme, un homme qui marche.
Dans 無人, l’homme est “potentiellement” présent, mais en tant qu’absenté. 

Ceci évoque immédiatement, pour un Chinois, le 無為/无为 le non-agir. Là encore, wú 無 ne nie pas l’action car le non-agir n'est pas le pas agir 无为而无不为. Il s’agit d’une position, d’un comportement qui permet au latent d’advenir.
Comme nous le développe François Jullien9, on peut certes viser la connaissance par concepts mais pas forcément le réaliser. Ainsi personne ne réalise vraiment, je veux dire complètement qu’il est promis à mourir et pourtant chacun le sait. Pour réaliser, au sens de la sagesse, il faut non des moyens mais des conditions. On ne peut que favoriser cette réalisation. 
Ainsi en va-t-il de toute maturation : inutile de tirer sur les pousses de blé 禾, dit Mencius, il faut les laisser pousser, mais en prenant soin de « biner » fréquemment à leur pied. En cela, la réalisation s’opère indirectement, toujours par un biais (celui de la remarque qui la favorise).
Quand on joue d’un instrument par exemple, à partir du moment où, à force d’effort et d’investissement, « cela » commence à venir, comme on dit (disant ainsi l’immanence), la capacité tend ensuite à se manifester d’elle-même, sans plus qu’on ait à s’en inquiéter, ni même à y penser - sans plus d’effort ni d’attention : comme un « fonds » [zī 资], toujours prêt à sourdre.
Ne peut-on pas y considérer le latent de la psychanalyse, l’ensevelit, un «il y a» sous la forme de l’affleurement. Et, par conséquent, on peut s’interroger sur le comment le réaliser.
Lacan évoque dans ce séminaire Un discours qui ne serait pas du semblant, ce wuwei, ce non-agir. Mais il s’extasie à cette occasion de comment le mot wéi 為 peut dire tout à la fois le verbe agir et la conjonction qui fait métaphore, comme, because, for.
[…] ça, c'est wéi 為 [为] et ça fonctionne à la fois dans la formule wúwéi 無為/无为 qui veut dire « non-agir », donc ça veut dire « agir », mais pour un rien vous voyez wéi employé comme « comme », ça veut dire « comme », c'est-à-dire que ça sert de conjonction pour faire métaphore. to do; act as / because of; for
[…] C'est pas mal une langue comme ça, une langue où les verbes, enfin les verbes les plus verbes : agir, qu'est-ce qu'il y a de plus verbe, qu'est-ce qu'il y a de plus verbe actif, se transforment en menues conjonctions, ça c'est courant. 10

紛 紛 fēn fēn = pêle-mêle; confusément; en foule, en masse

開且落 kāi qiě luò
    開 kāi  marque un départ, un début et signifie en l’occurrence s’ouvrir, s’épanouir 
( ouvrir une lumière, un robinet, une porte… • percer, frayer, pratiquer • s’ouvrir, s’épanouir • dégeler • lever, conduire, mettre en marche • se mettre en route, partir • fonder, créer, établir • commencer • tenir, organiser • écrire, prescrire • payer • bouillir)
    且 qiě   signe le à la fois, en même temps
            La « lecture » d’un texte en chinois rend possible la lecture simultané

    落 luò  dit le déclin et la chute
( tomber • baisser; descendre; décliner • déclin; décadence; affaiblissement • rester en arrière • s’arrêter; rester • laisser • revenir à; échoir à; incomber à • recevoir; attraper)
            
À la fois les fleurs éclosent et tombent. Car ce poème est une invitation à une sereine acceptation à épouser la transformation universelle et y consentir :
« La vie qui engendre la vie, c’est cela le changement. »

Ou comme l’énonce le Yi Jing : « La seule chose qui ne changera jamais, c’est que tout change toujours tout le temps. ». Il ne s’agit pas d’une loi, mais un fait qui se constate.
L'idée se retrouve chez Freud quant à l’évolution continue du vivant : « […] la mort est bien “le propre résultat” de la vie et, dans cette mesure, son but, tandis que la pulsion sexuelle est l’incarnation de la volonté de vivre11 »
Sur ce point, la psychanalyse rejoint la grande option chinoise de la morale : à savoir le mal comme « fixation », obstruction, le contraire du Dao, la voie. 

Selon François Cheng, pour réaliser cette transformation universelle, il est nécessaire que l'éclosion des fleurs soit vécue de l'intérieur de l'homme. Pour vivre cette expérience, l'homme doit faire le vide. 
Ainsi donc, avec le support de l’écriture, le poète est passé d’une construction visuelle à une élaboration spirituelle. Plus même, nous sommes nous-mêmes traversés par cette expérience du seul fait de contempler cette œuvre d’art. Telle est d’ailleurs la fonction de l’œuvre d’art en Chine.


Désormais on peut considérer diverses traductions proposées:
        Le Talus-aux-Hibiscus
        Branches extrémité / magnolias fleurs
        Montagne milieu / dégager rouges corolles
        Torrent logis / calme nulle personne
        Pêle-mêle / éclore de plus échoir

        Au bout des branches, fleurs de magnolia
        Dans la montagne ouvrent leurs rouges corolles
        Un logis, près du torrent, calme et vide
        Pêle-mêle, les unes éclosent, d’autres tombent12

                Le cirque des Magnolias
                Fleurs de lotus à la pointe des branches
                S'ouvrent à la montagne en habits rouges
                Sur la cabane au val muette et vide
                Leur foule turbulente éclôt puis tombe13

                    La montagne aux lotus
                    Au bout des branches des fleurs de lotus
                    Dans la montagne les corolles rouges éclosent
                    Près du torrent une maison tranquille, personne
                    Profusément ils fleurissent et tombent


Mais vous disposez désormais d'éléments suffisants pour proposer votre propre traduction…


Shitao (1642-1707) - Monts Jingting en automne - Musée Guimet
En bas à gauche, six lignes d'écriture régulière, suivies de date (1671), de signature et d'un cachet: Laotao (=Shitao) ; Enclin à la paresse et accablé de tourments, j'ai été sur le point d'enterrer mon pinceau et de brûler ma pierre à encre, comme j'aspirais à m'anéantir, à quitter mon enveloppe charnelle, mais je n'ai pu y parvenir. Dans l'abandon et la solitude, mes pas me conduisirent jusqu'au studio d'un ami. Là je vis tour à tour des peintures authentiques de Nizan et de Huang Gongwang, de Shen Zhou et de Dong Qichang. Mes jours, dès lors, furent au gré des impressions que j'en conservais; et bientôt, je recouvrai le sommeil et la saveur des mets. Que l'agate rouge et la coraline jaune, prix de bien des recherches, sont choses auxquelles il n'est pas facile de renoncer: c'est ce que j'ai appris de cette épreuve. A l'automne de l'année Xinhai (1671), au pied du mont Jingting, Shitao, Jishanseng (le moine du mont Ji). (Traduction Jacques Giès)











Dès qu'un Chinois rencontre ce texte
    d'abord il le lit
        puis il le regarde
            et il le récite…

                    Mù mò / fúróng huā,
                    shānzhōng / fāhóng è.
                    Jiàn hù / jì wúrén,
                    fēnfēn / kāi qiě luò.

                                                                                                    … et le chante !
La langue chinoise est à la jonction de la parole et du chant.
C’est une fête pour l’esprit. Un déferlement sonore accompagne un flux d’images, un film.
On a largement vu pourquoi, comme le pointe Lacan, « les poètes chinois peuvent pas faire autrement que d'écrire ». 
Mais il ajoute : « ils n'en sont pas réduits là, c'est qu'ils chantonnent, c'est qu'ils modulent, c'est qu'il y a ce que François Cheng a énoncé devant moi, à savoir un contrepoint tonique, une modulation qui fait que ça se chantonne, car de la tonalité à la modulation, il y a un glissement »
[…] peut-être y sentirez-vous quelque chose, quelque chose qui soit autre, autre que ce qui fait que les poètes chinois peuvent pas faire autrement que d'écrire. Il y a quelque chose qui donne le sentiment qu'ils n'en sont pas réduits là, c'est qu'ils chantonnent, c'est qu'ils modulent, c'est qu'il y a ce que François Cheng a énoncé devant moi, à savoir un contrepoint tonique, une modulation qui fait que ça se chantonne, car de la tonalité à la modulation, il y a un glissement.14
Et comment ne pas penser à cette expérience toujours éclairante pour nous de déclamer les transcriptions des séminaires de Lacan. 


Si la langue chinoise est à la jonction de la parole et du chant, le caractère chinois se trouve à la jonction de la peinture et de l'écriture. La calligraphie se dit shūfǎ  书法, littéralement : discipline d’écriture.
L’exécution au pinceau ne tolère ni retouche, ni correction, ni hésitation, ni repentir…
C’est l’art du trait par excellence. François Cheng en décrit très bien les enjeux :  « Quand un calligraphe chinois saisit son pinceau, il est persuadé que le souffle qui inspire sa main est le même que celui qui anime l’univers. Quand il pratique le Tai Ji Chuan, il est certain que le souffle avec lequel il communique est le même que celui qui meut toute chose vivante.15 »
Engendrée dans le mouvement du qi 气 l’écriture chinoise engage le corporel dans l’œuvre de création. Joël Bellassen parle de « l'éloquence graphique ».
Lacan souligne l'importance de ces calligraphies qui ornent les murs. Il suffit d'ailleurs de voir le besoin ressenti par des gens simples comme par des lettrés d’avoir dans leur intérieur des sentences calligraphiées. Elles sont là plus pour élever l’esprit et le nourrir, l’apaiser et l’inciter à la méditation, que pour le seul effet décoratif. C’est un repos de l’homme tout entier de les regarder et de savoir qu’elles sont là.


Pendant mon séjour de cet été à Beijing, j'ai demandé à différents calligraphes de m'écrire le poème que nous avons étudié. 
Voici deux productions en style régulier kǎishū 楷書. Il existe en effet des styles de calligraphie comme chez nous des écoles de peinture. Ces deux calligraphes ont une culture lettrée et ils sont respectueux du texte.
            

Ci-dessous est l'interprétation (comme on parle d'interprétation en musique) dans un style cursive dite cǎoshū 草書. Il s'agit de l'œuvre quelque peu maladroite d'un calligraphe de rue, un peu surpris par ma demande. Mais on peut y voir l'implication du corps, du calligraphe, la dynamique du trait…
            

Ce sont de telles calligraphies qui inspirent les propos de Lacan lors de sa conférence du 12/05/1971 intitulée Lituraterre, conférence qui s'inscrit dans ce séminaire D'un discours qui ne serait pas du semblant. Lacan y développe de façon brillante la notion de lettre.
La référence à la calligraphie y est essentielle. Dans la calligraphie - je reprends là les formules de Lacan - le mariage de la peinture à la lettre, et en particulier dans la cursive, dans le style dit herbe folle, cǎoshū 草書, ce mariage est évident. Dans ce style dit herbe folle « le singulier de la main écrase l'universel » et la dimension du signifiant, signifiant pourtant soutenu par la lettre.
La lettre nous amène « au bord du trou dans le savoir, voilà-t-il pas ce qu'elle dessine ». La lettre est proprement le littoral, le bord du trou dans le savoir. « Entre centre et absence, entre savoir et jouissance, il y a littoral ».
Voilà en quoi la lettre est « ce qui dans le réel se présente comme ravinement. […] L’écriture est dans le réel le ravinement du signifié, ce qui a plut du semblant en tant qu’il fait le signifiant. »
Ce qui, comme le dit précisément Lacan, d’entre les nuages […] a plut ! yún-yǔ 云雨 nuage-pluie, les Chinois disent ainsi le rapport sexuel…

Mais tout commence par un premier trait…
C'est 1961, lors du séminaire sur le Transfert que Lacan reprend la notion freudienne de einziger Zug. Mais c'est lors du séminaire suivant (L'identification, décembre 1961) et à la suite de la découverte des encoches pratiquées sur des os au Mas d'Azil que Lacan fera du trait unaire l'essence du signifiant. La différence qualitatives des traits peut à l'occasion souligner la mêmeté signifiante.
Le trait unaire marque le un de différence à l’état pur, il manifeste la fonction du signifiant qui, à la différence du signe, ne représente (vorstellen) pas quelque chose pour quelqu’un mais représente (repräsentieren) un sujet pour un autre signifiant. Il est « effaçon » de la chose.
Le trait unaire manifeste l’écrit (le phonème, trait différentiel) dans la parole.16

En 1967, Lacan mentionne « Shitao qui, dans ce trait unaire; en fait grand état, il ne parle que de ça pendant un petit nombre de pages. ça s'appelle en chinois yi qui veut dire 1 ou qui veut dire : trait. 17 »
Lacan se réfère alors au texte écrit par Shitao , ce grand peintre chinois du XVIIe siècle qui développe le concept de l’unique trait de pinceau. À partir de ce geste technique, le plus simple qui soit, dérisoire même, Shitao développe les considérations les plus remarquables sur la philosophie et la cosmologie chinoise. À travers ce trait de pinceau s’exprime le rythme spirituel et le Un Absolu. 
François Cheng témoignera de l’intérêt que Lacan portera à cet écrit. Il écrira lui-même, après ses multiples échanges avec Lacan : « Le Trait est à la fois le Souffle, le Yin-Yang, le Ciel-Terre, les Dix-mille êtres, tout en prenant en charge le rythme et les pulsions secrètes de l’homme.18 »

Ce concept qui est une création de Shitao. […] Le paradoxe essentiel de ce concept est qu'il possède, comme point de départ, une signification concrète et technique d'une simplicité presque dérisoire, et qu'en même temps, l'usage qui en est fait le charge d'un ensemble de références qui va nous renvoyer aux principes fondamentaux les plus abstrus de la philosophie et de la cosmologie chinoises anciennes. […] premier balbutiement du langage pictural, il en est aussi le fin mot.
C'est le trait de pinceau qui est considéré comme le canal privilégié par lequel s'exprime « le rythme spirituel » (dont l'expression, comme on le sait, constitue cette limite absolue vers laquelle tend toute peinture) […] Grâce à l'ambivalence du terme yi qui ne signifie pas seulement « un », mais aussi « l'Un Absolu » de la cosmologie du Livre des Mutations et de la philosophie taoïste.
    « L'Un est l'origine de l'infinité des créatures, c'est le Dao sous sa forme absolue »
Il incarne de manière exemplaire l'attitude du peintre chinois, épurée jusqu'en ce qu'elle représente de plus universel, c'est-à-dire, la vision de l'homme agissant en communion avec l'Univers.19

Dans le séminaire L'identification (20/12/1961) Lacan soutient que l'écriture est première par rapport à la parole. Il réaffirme cette conception dans D'un Autre à l'autre (14/05/1969), en se référant à l'écriture chinoise
Que l’écriture soit première et doive être considérée comme telle au regard de ce qui est la parole, c’est ce qui après tout peut être considéré comme non seulement licite mais rendu évident par la seule existence d’une écriture comme la chinoise.

C'est donc bien là où ç'aurait été le plus simple, si l'on peut dire, que l'écriture ne soit que transcription de ce qui s'énonce en paroles, qu'il est frappant de voir que, tout au contraire, l'écriture, loin d'être transcription, est un autre système, un système auquel éventuellement s'accroche ce qui est découpé dans un autre support, celui de la voix.20

À partir de 1971, un changement de point de vue s’amorce, curieusement toujours en référence à l’écriture chinoise. Lors du séminaire Un discours qui ne serait pas du semblant, il affirme : 
« L’écrit est non pas premier mais second par rapport à toute fonction du langage […] C’est de la parole que se fraie la voie vers l’écrit. 21 ». Ou encore : « L’écriture c’est quelque chose qui en quelque sorte se répercute sur la parole, sur l’habitat de la parole22 »
C’est parce que c’était écrit et écrit comme ça, car je l’ai écrit à maintes reprises, que vous ne l’avez pas entendu. C’est en ça que l’écrit se différencie de la parole, et il faut l’en beurrer sérieusement, mais naturellement non pas sans inconvénients de principe, pour qu’il soit entendu... C’est de la parole que se fraie la voie vers l’écrit.23

Dans ce même séminaire, il suggère la conjonction de l’écriture et du langage :
 « L'écriture n'est jamais, depuis ses origines jusqu'à ses derniers protéismes techniques, que quelque chose qui s’articule comme os dont le langage serait la chair. […]24 » 
Lacan reprend là une formulation des calligraphes pour lesquels le trait de pinceau comprend l'os - qui donne vie ou mort, fermeté et droiture - et la chair - lorsque les pleins et les déliés expriment la réalité des choses.
Le pinceau a quatre effets : le tendon (jīn筋), la chair (ròu肉), l’os (gū骨) et le souffle (qì气). Le tendon, c’est lorsque l’élan se poursuit alors que le pinceau s’interrompt. La chair, c’est lorsque les pleins et déliés expriment la réalité des choses. L’os, c’est ce qui donne vie ou mort, fermeté et droiture [au trait]. Le souffle, c’est lorsque les traces de peinture sont indéfectibles. C’est pourquoi les traits tracés à l’encre trop dense perdent leur corps, ceux à l’encre trop fluide manquent de rectitude et de souffle ; si le tendon est mort, il ne peut y avoir de chair. Un tracé qui s’interrompt totalement n’a pas de tendon ; s’il cherche à charmer, il n’a pas d’os.25

Si le langage est premier, l’écriture rend compte de la structure intime des choses, lǐ 理. C’est caractère qui a été choisi au XXe siècle pour traduire le concept de raison de la philosophie occidentale.
[lǐ 理]  a occupé une place privilégiée dans ce qu’on a appelé le néoconfucianisme, qui a orienté toute la pensée chinoise à partir de sa naissance sous les Song (XIe - XIIe s.). Il y constitue l’une des notions clés, ayant hérité de l’Antiquité une belle généalogie sémantique : de l’action du lapidaire polissant le jade dans le sens de ses veines remarquer la clé alias yù 玉, le « jade », qu’il révèle car elles sont tout d’abord foncières et largement invisibles, est venue l’idée d’un ordonnancement secret qui traverse tout le réel, lui donnant une cohérence prégnante et d’autant plus forte qu’elle est latente.
De là, li devient l’« ordre » intrinsèque aux choses, la « raison», et en général tout « principe» constant de rationalité organisant l’univers et ses sous-produits: c’est sous ce sens qu’il triomphe dans le néoconfucianisme.26


La calligraphie est donc comme une pure jouissance de la lettre où il s’agit de tracer le trait unique d’un seul coup, sans rature. La calligraphie est un art corporel, vecteur du dit et du non-dit.
Pour les Chinois, l’écriture qui est domestication du corps et jouissance pulsionnelle, fraye la voie, le Dao. Elle nécessite une attitude corporelle de même nature que celle des arts corporels inspirés par les principes taoïstes.
Elle fait œuvre utile et participe à ce jouir utile que développe le taoïsme. Il s’agit pour le taoïsme de ménager le vivant et jouir du mouvement de la vie. Les principes et les méthodes de longévité cherchent à régénérer l’énergie affaiblie, en faisant circuler les souffles, qì气. Lacan fait mention de ces techniques du taoïsme et en particulier le fait de retenir son foutre. Ce sont des techniques de jouissance utile.
Tout ça ne veut pas dire, mes petits amis, qu’il n’y ait pas eu des trucs de temps en temps, grâce auxquels la jouissance, sans compter quoi il ne saurait y avoir de sagesse, a pu se croire venue à cette fin de satisfaire la pensée de l’être, mais voilà j’ajoute cette fin n’a été satisfaite qu’au prix d’une castration. Dans le taoïsme par exemple, vous ne savez pas ce que c’est bien sûr, très peu le savent, enfin moi je l’ai pratiqué, j’ai pratiqué les textes bien sûr, dans le taoïsme et l’exemple est patent dans la pratique même du sexe, il faut retenir son foutre pour être bien.27

L’écriture, à partir du trait unaire, peut être considérée comme la forme la plus subtile et la plus élaborée de jouissance utile. 
C’est dans l’Introduction à l’édition allemande des Écrits (p.14), que Lacan utilise ce terme de jouissance utile. Est-ce en référence à cette conception taoïste ? Est-ce une allusion à la jouissance de vie ?

Et Lacan d’ajouter : « l'écriture, elle, pas le langage, l'écriture donne os à toutes les jouissances qui, de par le discours, s'avèrent s'ouvrir à l'être parlant. Leur donnant os, elle souligne ce qui y était certes accessible, mais masqué, à savoir que le rapport sexuel fait défaut au champ de la vérité »
[…] C'est bien en cela qu'elle démontre que la jouissance sexuelle n'a pas d'os, ce dont on se doutait par les moeurs de l'organe qui en donne chez le mâle parlant une figure comique. 
    Mais l'écriture, elle, pas le langage, l'écriture donne os à toutes les jouissances qui, de par le discours, s'avèrent s'ouvrir à l'être parlant. Leur donnant os, elle souligne ce qui y était certes accessible, mais masqué, à savoir que le rapport sexuel fait défaut au champ de la vérité en ce que le discours qui l'instaure ne procède que du semblant à ne frayer la voie qu'à des jouissances qui parodient, c'est le mot propre, celle qui y est effective, mais qui lui demeure étrangère. 
    Tel est l'Autre de la jouissance, à jamais inter-dit, celui dont le langage ne permet l'habitation qu'à le fournir, pourquoi n'emploierais-je pas cette image, de scaphandres.28

  

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1 Cyrille J.-D. Javary, Le discours de la tortue


2 Rainier Lanselle, Note de l’interprète, décembre 2004


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3 Erik Porge; Sur les traces du chinois chez Lacan ; Exposé présenté au Symposium international de psychanalyse qui s’est tenu à Chengdu (Chine) en avril 2002













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4 Anne Cheng, Histoire de la pensée chinoise, p. 182



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5 J. Lacan, Alla Scuola Freudana - 30/03/1974


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6 François Cheng, Vide et plein - Le langage pictural chinois, Éditions du Seuil, Paris, 1979, p.27



7 J.Lacan, L'objet de la psychanalyse, 08/06/1966









8 François Cheng, Vide et plein - Le langage pictural chinois, Éditions du Seuil, Paris, 1979, p.29




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9 François Jullien, Un sage est sans idée — ou l’autre de la philosophie














10 J. Lacan, Un discours qui ne serait pas du semblant, 10/02/1971
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11 Sigmund Freud, Au-delà du principe de plaisir, in Essais de psychanalyse, Paris, Petite Bibliothèque Payot, 1982, p.97



















12 François Cheng





13 Jean-Pierre Diény






















































14 J. Lacan, L'insu que sait de l'une bévue s'aile à mourre - 19/04/1977









15 François Cheng, Vide et plein - Le langage pictural chinois; Édition du Seuil, 1979





























































16 Erik Porge; Sur les traces du chinois chez Lacan ; Exposé présenté au Symposium international de psychanalyse qui s’est tenu à Chengdu (Chine) en avril 2002

17 J. Lacan, La logique du fantasme - 26/04/1967





18 François Cheng, Vide et plein - Le langage pictural chinois; Édition du Seuil, 1979; pp.42-43






19 Pierre Rycksman, Traduction et commentaire du traité de Shitao, Les propos sur la peinture du moine Citrouille-amère, première édition en 1970







20 J.Lacan, D'Un Autre à l'autre, 14/05/1969


21 J. Lacan, Un discours qui ne serait pas du semblant, 17/02/1971

22 J. Lacan,, Un discours qui ne serait pas du semblant 10/03/1971

23 J.Lacan, Un discours qui ne serait pas du semblant, 17/02/1971

24 J. Lacan, Un discours qui ne serait pas du semblant - 9/06/1971





25 Jing Hao, De la technique du pinceau.










26 Rainier Lanselle













27 J.Lacan, Encore, 8/05/1973












28 J.Lacan, Un discours qui ne serait pas du semblant - 9/06/1971
Lacan, le chinois, le profit 

Guy Flecher
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