Zhang Haiyan a exposé de façon très vivante la progression de la cure, et son propre cheminement au cours des séances et après leur suspension. Elle cherche « à recevoir critiques et conseils des spécialistes présents.

Elle nous dira au cours des débats que cette patiente lui envoie ses vœux aux moments des fêtes chinoises et qu’elle lui renvoie les siens, autrement dit, propose une intervenante française « que vous êtes toujours là pour elle ».


Olivier Douville

J’ai eu le sentiment à cette écoute d’être à un moment de la naissance de la psychanalyse. Si l’on est ici pour assister à la naissance de la psychanalyse comme un événement daté de notre passé, cela reviendrait à exiger de nos amis chinois que leur histoire avec la psychanalyse passe par la nôtre, alors il n’y aurait ni passerelle, ni voyage et s’évaporerait notre raison d’être ici, en Chine, avec des collègues psychanalystes et notre désir d’avec eux parler. Je vais maintenant tenter de parler plus précisément de l’exposé que nous avons eu le bonheur d’entendre.

Le titre de ce texte « Désir dans la nuit noire » qui revient à la fin. Le sous-titre l’énigme du sujet désigne le don que cette femme « analysante » fait à l’analyse et, maintenant, à nous-même. Nul doute que nous ayons ici un exposé rigoureux de rendre compte des diverses dimensions du transfert qui ne se réduit pas à des manifestations et à des mouvements d’amour et de haine, mais concerne aussi la quête d’une scène où le sujet serait reconnu dans son lien avec le désir et l’objet féminin. Ce qui me semble aussi important est cet état de sidération du sujet qui est pris dans un champ où le démarcage du signifiant n’opère plus entre les termes qui disposent d’une part l’obscur, d’autre part la clarté. Il y a là des phénomènes de dissociation qui impliquent le transfert non seulement comme répétition mais aussi comme possibilité d’arracher au dire (voire au corps) de l’analyste des traits d’identification permettant de la distinction. Bien sûr encore si nous pouvons entrevoir ici toutes les difficultés qu’il y a pour le sujet à transférer alors qu’il est pris dans une passion amoureuse, nous pouvons aussi nous interroger quant à la valeur symptomatique de cette passion qui protège, peut-être contre un envahissement par l’imago maternelle. Aussi ce qui est attendu serait paradoxalement un certain silence qui respecte la passion et un acte de parole qui recrée des sentiments imaginaires non narcissiques de consistance et d’orientation du corps. Il n’en reste pas moins que cet univers où est coupé le jour, ce pouvoir de la lumière de découper et d’ordonner les plans, rendant peu localisable ce qui fait toilette (et accueille aussi en nous en débarrassant les résidus excrémentiels du corps), est un univers où n’est pas mis en opération un signifiant qui opère une découpe de la jouissance. D’où la difficulté, une fois de plus, de s’en tenir à une application besogneuse du fantasme hystérique pour comprendre ce cas. Je suis très sensible au tact et à l’intelligence de notre collègue Zhang Haiyan qui expose fort clairement la marche de cette cure la façon dont elle a trouvé juste de la diriger. Je cite là un passage de votre texte : « Nous ne pouvons nous empêcher donc de questionner la raison qui soutient le refus de son propre désir ? Y a-t-il derrière ce désir, un autre désir inconnu qui ne s’est éclairé que dans la nuit noire ? »

Naissance de la psychanalyse, et, tout autant, émergence du psychanalyste et du psychanalysant (pour reprendre ici l’expression d’E. Shrape, reprise ensuite par Lacan).


La salle

Le débat a été très largement alimenté par les occidentaux, qui ont voulu apporter à Zhang Haiyan un éclairage de qualité. A été comme intervention chinoise : concernant moi-même, il y a trois ans, il y a un jeune au cours d’une analyse, il a tout d’un coup explosé, bien sûr c’est un transfert, mais ça soulève un petit problème. Un ami m’a téléphoné par la suite pour me proposer une assurance et là j’ai dit « je vais peut-être réfléchir », d’habitude je n’en prends jamais. Une semaine après le patient était parti.


Un intervenant chinois

Je parle en tant que travailleur en psychologique depuis 8 ans. J’ai entendu il y a deux ans un cours donné par M. Huo Datong et depuis j’ai établi un lien très intime avec l’Université du Sichuan. J’estime que du point de vue de la psychanalyse je suis un petit enfant, donc je voudrais dire mon point de vue sur ce texte.

Cet intervenant évoque Mélanie Klein et Winnicot, puis à propos de l’interruption de la cure… Peut-être en fonction de la culture chinoise, du savoir chinois parce que ce type d’analyse c’est quand même quelque chose de nouveau, ça vient de l’Europe, l’analyste très vite peut-être n’est pas aussi avancé  Il faut attendre quelques années et ne pas attendre des choses parfaites. Elle peut considérer que ça suffira. L’analyse en Chine se trouve dans l’état d’enfance. Quand Orchidée a quitté le cabinet, a-t-elle divorcé, continué sa relation avec le directeur ou reviendra t-elle en analyse ? Ça n’est pas le problème de l’analyste, c’est un problème de sociologue ou de juriste. En attendant, l’impression qui m’est restée entre hier et aujourd’hui est une impression de joie, le principal est de la faire et d’étudier.


D’une Française

De ma position non pas d’expert mais d’autre étranger, j’ai eu vraiment l’impression que vous vous répondiez avec beaucoup de circulation entre vous, et j’ai eu le fantasme que finalement c’est ce qui comptait le plus pour vous. Et j’en ai été très contente.


Zhang Haiyan

Je remercie pour l’aide et le soutien de vous tous à mon égard. J’ai appris beaucoup et ça m’a fait beaucoup réfléchir. J’ai appris par la personne précédente que c’était un processus. Ce processus m’a fait réfléchir sur mon propre désir. Merci beaucoup.


 

Discussion

à propos de la communication de Zhang Haiyan


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